• Mali: La SADI réclame un débat public sur la situation dans le nord
    Sécurité - Le parti de la Solidarité africaine pour la démocratie et l'indépendance (SADI) a demandé la tenue d'un débat public à l'Assemblée nationale sur la situation dans le nord Mali.

    Dans un communiqué publié à Bamako, la SADI précise que l'objectif est de mesurer toute l'ampleur et les différentes dimensions de la situation et y apporter des solutions efficaces et durables.

    La SADI condamne les attaques de la rébellion armée dans le nord du pays et apportant son soutien à l'armée nationale dans sa mission de défense de l'intégrité du territoire.

    Elle appelle l'armée à faire preuve de discernement afin d'éviter la provocation qui entraînerait des représailles et des exactions sur les populations civiles.

    Le Mali connaît depuis quelques mois un regain de violence dans sa partie nord qui se caractérise par une rupture unilatérale de la trêve observée par l'alliance du 23 mai suite aux accords d'Alger de juillet 2006.

    Selon la SADI, cette situation traduit l'échec du président Amadou Toumani Touré dans la recherche d'une solution durable à la crise dans le nord du pays.

    "Cet échec se traduit par des initiatives politiques hasardeuses basées sur le copinage pour résoudre une question politique essentielle et une diplomatie tatillonne qui navigue dans la confusion et le clair-obscur», déclare la SADI.

    «La gestion de cette crise se résume en la seule personne d'Amadou Toumani Touré et elle ne tire aucune leçon de notre histoire récente qui démontre que, malgré l'avènement de la démocratie au Mali, la société touareg n'a connu aucune transformation sociale profonde", ajoute-t-elle.

    Bamako - 04/06/2008

    Pana

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  • Les troubles au Nord du Mali aggravent la situation sécuritaire aux frontières : L’Algérie reprend la médiation
    La sécurité aux frontières sud préoccupe l'Algérie. Des mouvements de rébellion touareg, autant au Mali qu'au Niger, se sont intensifiés ces derniers mois. L'affaire énigmatique des deux touristes autrichiens, kidnappés par un groupe armé qui s'est évaporé dans le désert, rajoute une touche à l'inquiétude d'une instabilité soutenue dans les vastes contrées du Sud.

    Hier, le ministre malien de la Défense et des Anciens combattants, Natié Plea, en visite officielle à Alger, a été reçu par le président Abdelaziz Bouteflika, après avoir eu de longues discussions avec les chefs militaires algériens, dont le général à la retraite Abdelmalek Guenaïzia, ministre délégué auprès du ministre de la Défense nationale, et les responsables des services de renseignements. Les actions revendiquées par ce qui est appelé Al Quaïda au Maghreb islamique et les troubles dans la région de Kidal font que les deux pays sont amenés à travailler ensemble même s'il y a des aspects opérationnels à mettre en œuvre et des questions politiques à régler. « Nous avons échangé utilement des points de vue liés aux préoccupations communes qui touchent à la sécurité de nos frontières. Nous avons envisagé de mener ensemble des actions concertées pour gérer ce problème très sensible », a-t-il déclaré, repris par l'agence officielle APS. Il a annoncé avoir présenté un « compte rendu » au chef de l'Etat sur les discussions qu'il a eues avec les responsables militaires. Depuis plusieurs mois, l'Algérie et le Mali tentent de coordonner leurs actions sur le terrain pour mieux surveiller des frontières longues de 1340 km. Des frontières réputées trop ouvertes et qui connaissent des trafics en tous genres comme ceux des armes légères et des drogues dures. Il est question que les armées des deux pays montent des patrouilles communes pour contrôler les lignes frontalières. L'Algérie cherche à se doter de moyens électroniques pour mieux surveiller les frontières situées en zone désertique.

    Sur le plan politique, Bamako souhaite une action plus soutenue d'Alger pour accélérer la médiation entre le gouvernement central et Ibrahim Ag Bahanga, chef des rebelles touareg. Les deux pays demeurent attachés aux accords de paix d'Alger. Des accords malmenés ces derniers temps avec la reprise des hostilités entre les rebelles et l'armée régulière. Abdelkrim Gheraieb, ambassadeur d'Algérie à Bamako, a repris, fin mai 2008, les contacts avec toutes les parties concernées. Il est chargé officiellement par Alger d'assurer le rôle de médiateur. Le président malien, Amadou Toumani Touré, a reçu le diplomate et lui a rappelé la nécessité de redonner vie aux accords d'Alger. Ibrahim Ag Bahanga, qui est en contact avec le médiateur algérien, devrait se déplacer à Alger les prochaines semaines pour poursuivre les consultations. Alger entend donc reprendre l'initiative après avoir manqué, quelque peu, de suivre l'application des accords de 2006. Parallèlement, la Libye, dont la diplomatie secrète est active dans la région sahélienne, veut engager sa propre médiation, entrant en concurrence directe avec l'action menée par Alger.

    Trois jours seulement après les discussions entre le président malien et l'ambassadeur algérien, des notables pris en charge par Tripoli sont arrivés à Bamako pour engager « la médiation » entre les rebelles et le gouvernement. Ayant échoué à deux reprises à la relance de cette médiation, la Libye a constitué ce qui est appelé l'Association populaire et sociale des tribus du Grand Sahara qui devrait travailler pour le règlement des conflits dans cette région (Niger et Tchad également). Manière probablement pour Mouamâr El Kadhafi de reprendre, par d'autres moyens, son projet du « Grand Sahara ». Cependant, Bamako semble privilégier la solution algérienne. « On ne va pas multiplier les canaux de médiation. Le médiateur, c'est l'Algérie, et le cadre c'est toujours l'accord d'Alger », a précisé une source de la présidence à l'agence française AFP. Pour réussir la médiation, l'Algérie doit convaincre l'armée malienne de ne pas engager les troupes dans les combats contre les rebelles, appelés « bandits armés » par la presse de Bamako. D'où la visite à Alger du ministre de la Défense malien. L'armée malienne a mené ces dernières semaines des opérations dans le nord du pays pour traquer les rebelles armés. Ibrahim Ag Bahanga souhaite un arrêt de ces actions militaires pour donner crédit aux futures négociations. Restaurer « un climat de confiance » est nécessaire à ses yeux. C'est cette rupture de confiance qui a amené Ibrahim Ag Bahanga à ne pas respecter l'accord d'entente signé à Tripoli en avril 2008 avec le gouvernement.

    Par Faycal Metaoui
    El Watan

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  • REFUGIES TOUAREGS AU BURKINA: le flux continue
    Les réfugiés touaregs du Mali et du Niger, installés au stade du 4-Août à Ouagadougou, ont reçu dans l'après-midi du mercredi 4 mai dernier la visite du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération régionale, Djibrill Bassolé. Il était accompagné de deux autres membres du gouvernement.

    Ils étaient jusqu'au mercredi 4 mai 2008, 329 touaregs maliens identifiés à Ouagadougou et 954 à Djibo, a déclaré le coordonnateur de la Commission nationale des réfugiés, Der Kogda. Parmi eux, il y a quelques Nigériens. Tous ont quitté leurs pays, le Mali et le Niger, en proie à une crise armée entre le pouvoir en place et la rébellion touarègue. Se sentant en insécurité, ces Touaregs ont choisi le Burkina pour s'y réfugier. A Ouagadougou, ils sont logés provisoirement au stade du 4-Août et un comité interministériel, associé à des ONG, a été mis en place pour s'occuper d'eux et selon Der Kogda, un certificat provisoire de réfugiés leur est délivré.

    La représentation régionale du Haut- commissariat des réfugiés est également impliquée. Le coordonnateur de la Commission nationale des réfugiés a relevé que sur le plan sanitaire, il y avait 2 malades dont une personne adulte qui s'en est sortie, tandis qu'un bébé de 15 mois est décédé suite à une malnutrition prononcée.

    "Les conditions d'un réfugié ne sont jamais idéales", a indiqué le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération régionale, Djibrill Bassolé. Le souci du gouvernement, dit-il, est de faire en sorte que leur bref séjour au Burkina se passe dans de bonnes conditions. Si le site du stade du 4-Août n'est pas adapté, le ministre Djibrill Bassolé fait savoir que les services techniques sont en train de voir dans la commune de Pabré et à Djibo comment, "des sites plus propices et plus adaptés peuvent être aménagés avec des conditions de vie des populations nomades touaregues."

    Mais l'inquiétude du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération régionale vient du fait que le flot des réfugiés ne ralentit pas, puisque des arrivées sont signalées du côté de la frontière malienne. Mohamed Ag Assaleh, qui s'est exprimé au nom des réfugiés touaregs, a remercié les autorités burkinabè pour l'hospitalité qui leur a été offerte. Le ministre Djibrill Bassolé a lancé un appel aux partenaires, aux ONG, au HCR pour soutenir le gouvernement burkinabè dans cette situation.

    Il relève que le président du Faso, président en exercice de la CEDEAO, s'impliquera dans la recherche de solutions qui puissent ramener définitivement la paix et la stabilité au Mali et au Niger. Le ministre Djibrill Bassolé était accompagné du ministre de l'Action sociale et de la Solidarité nationale, Pascaline Tamini et du ministre délégué à la Coopération régionale, Minata Samaté.
    Par Antoine BATTIONO
    © Copyright Le Pays

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  • Le Mali compte sur l’Algérie pour contrôler les frontières communespar Ali Babès

    La sécurité des frontières algéro-maliennes, le contrôle plus draconien de cette large bande frontalière de quelque 1.376 km et, surtout, la gestion de la rébellion touarègue qui empoisonne le pouvoir à Bamako ont été au menu des entretiens mercredi à Alger du ministre de la Défense malien et le président Bouteflika. Selon le ministre malien de la Défense, M. Natité Plea, l'Algérie et le Mali ont décidé de mener des actions concertées pour « la sécurité de leurs frontières communes, en vue de les gérer ensemble ». Il a précisé avoir évoqué avec les responsables algériens, dont le ministre délégué à la Défense, M. A.Guenaïzia, la sécurité des frontières des deux pays ainsi que les moyens à mettre en œuvre pour gérer « ce problème très sensible ».

    La présence à Alger du ministre malien de la Défense, quelques jours après celle du chef de la diplomatie malienne, intervient dans une conjoncture assez particulière qui prévaut dans les régions du nord du Mali. La rébellion touarègue avait repris le chemin de la guérilla, avec des combats très violents entre troupes gouvernementales et Touaregs appartenant au groupe de Ibrahim Ag Bahanga. En fait, c'est pratiquement toute la zone du nord du mali qui pose aujourd'hui problème. Une vaste zone difficile à contrôler, sinon à gérer, d'autant qu'elle constitue, selon des agences du renseignement occidentales, une des bases arrière de réseaux terroristes affiliés à Al-Qaïda. Mais, la visite du ministre malien de la Défense, après celles de plusieurs responsables maliens au cours de ces six derniers mois, est directement liée à la dissidence touarègue. Selon des spécialistes des questions africaines, le gouvernement malien serait actuellement préoccupé par l'émergence d'une seconde dissidence malienne (MNJ) dans le nord du pays.

    Une préoccupation de plus alors que les combats font rage dans cette partie du pays d'où près d'un millier de Touaregs ont fui vers le Burkina Faso. La situation serait très instable, selon des réfugiés touaregs. « C'est l'insécurité et la peur qui nous ont fait fuir vers le Burkina. Nous avons vécu la même situation il y a quelques années. Quand il y a un début de conflit, nous préférons partir », souligne Mohamed Ben Nayni, hébergé avec 200 autres réfugiés au stade du 4-Août à Ouagadougou. La reprise des combats entre troupes gouvernementales et dissidence touarègue explique, d'autre part, le voyage algérien du ministre malien de la Défense. Une visite qui intervient, d'autre part, au lendemain de l'escale algérienne de la ministre autrichienne des Affaires étrangères, Ursula Plassnik, qui a confirmé mardi avoir effectué une brève visite au Mali et en Algérie « ces derniers jours » pour parler de l'enlèvement de deux Autrichiens par Al-Qaïda en février en Tunisie. Car l'affaire des deux otages autrichiens qui auraient été kidnappés par la branche d'Al-Qaïda au Maghreb, l'ex-GSPC, et cachés au nord du Mali, dans la zone de Kidal, donne une tournure particulière aux derniers événements enregistrés dans la région. Une région devenue un croisement de groupuscules terroristes, dissidents politiques, trafiquants de drogue et bandits de grands chemins. Mais, la région, à cheval sur tout le Sahel, intéresse également, et au plus haut point, les responsables militaires américains qui voudraient trouver un « point d'appui » pour pénétrer dans la zone et intervenir directement, militairement à travers le projet de l'Africom, contre les réseaux terroristes qui s'y réfugient. Le nord du mali n'a pas encore révélé tous ses secrets, même si à Bamako on compte énormément sur l'intervention d'Alger pour contrôler, au moins, la dissidence touarègue.

    © Le Quotidien d'Oran

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  • L’impérialisme français en Afrique de l’Ouest.
    L'article que nous publions ci-dessous est tiré du journal ivoirien «Le courrier d'Abidjan» du 28 septembre 2005. Malgré les trois années écoulées, et les changements survenus au sein de l'Union africaine, la CEDEAO et à la tête du Nigeria -notamment le départ de Obasanjo-, l'analyse garde toute sa fraîcheur. Sa publication rejoint dans les grandes lignes ce que les démocrates, les gens les plus lucides ne cessent de répéter, depuis le 5 février 2005 et bien avant, sur le rôle de la France et de ses fidèles valets au Togo et dans la sous région.

    Néanmoins, il convient de se démarquer de certains passages qui, en abordant la crise togolaise, présentent Alpha Konaré comme le garant de la démocratie. Les faits ont, amplement, montré que c'est de tordre le coup à la démocratie que de présenter Konaré comme tel. Il ne fait aucun doute que -lors de la prise du pouvoir illégale de Faure Gnassingbé- la lutte entre Obasanjo et Konaré n'avait rien à voir avec la démocratisation de notre pays, que c'était un affrontement entre des clans rivaux au service de l'impérialisme international français et américain notamment.

    Par ailleurs, quand l'auteur, abordant les manœuvres du valet Obasanjo au Togo et l'issue honteuse de la crise, écrit: «Les patriotes togolais n'ont que leurs yeux pour pleurer», il fait incontestablement allusion aux faux démocrates regroupés au sein de la coalition (UFC, CAR, CDPA). Seulement, il est difficile de ranger parmi les patriotes un Agboyibo, celui-là qui s'est déclaré disposé à servir les intérêt de la France, un Gnininvi, un Edem Kodjo etc, qui n'en pensaient pas moins.. Partisans de par leur nature de la démocratie par la conciliation, ils ont cru que les négociations leur apporteraient le pouvoir sur un plateau par la vertu d'élections «libres et transparentes», et ils ont été déçus. Mais s'ils ont pleuré, ce n'est pas bien longtemps, et la suite l'a bien montré.

    Seuls les démocrates et patriotes authentiques,-à l'instar du Front des organisations démocratiques togolaises en exil, ont fait preuve de courage et de lucidité pour dénoncer, dès la mort de l'autocrate sanguinaire Etienne Eyadema, les manœuvres du couple Obasanjo-Konaré comme une véritable diversion.

    Le principal enseignement à retenir, c'est la confirmation du rôle de l'impérialisme américain et français dans la sous région, en tant qu'obstacle à l'émancipation des peuples africains. Avec l'appui de différents réseaux de renseignements, officines et autres barbouzes, l'impérialisme français tient les pays de la sous région en laisse. En tant que système de domination économique, politique et culturel, l'impérialisme mène avec la complicité de ses valets locaux une politique de pillage, de brigandage en semant la misère la plus cruelle, sous toutes ses formes, physique et morale. C'est à ce sinistre spectacle que nous assistons depuis plus d'un siècle, depuis que les expéditions coloniales ont commencé.


    Chirac - Obasanjo : la vraie histoire d'une alliance contre-nature

    Comment se fait-il que le Nigeria, ennemi numéro un de la France officielle depuis les indépendances, soit devenu quasiment son valet, dans ses stratégies impériales en Côte d'Ivoire et au Togo ? Retours sur l'Histoire et explications. Ou comment Olusegun Obasanjo a liquidé la dimension panafricaine de la politique étrangère de son pays, pour se satisfaire d'intérêts à courte vue... Et si en Olusegun Obasanjo, deux hommes se battaient ? Et si, derrière ses boubous chamarrés, le président de la Fédération nigériane cachait un violent conflit intérieur entre l'officier héroïque de la guerre du Biafra, déclarée par une coalition françafricaine travaillant main dans la main avec les sécessionnistes; et le chef d'Etat blasé et sans scrupules implémentant aujourd'hui les stratégies les plus hargneuses de la Françafrique. ?


    Nigeria: de Foccart à Chirac

    En effet, ce qui apparaît de plus en plus aux yeux des observateurs comme une alliance claire et nette entre le président français Jacques Chirac et le locataire du palais d'Abuja est un retournement historique profond, pour ne pas dire une trahison phénoménale de l'histoire du Nigeria. Car depuis les indépendances, la France gaulliste, à travers un des «pères spirituels» de Jacques Chirac, Jacques Foccart, n'a pas cessé de se mettre en travers du chemin du Nigeria, considéré comme le seul obstacle à une hégémonie de l'Hexagone en Afrique de l'Ouest à travers le pacte colonial.

    C'est un fait que la France officielle elle-même n'a jamais été tentée de contredire. En témoigne un livre riche d'enseignements, «Afrique: les stratégies française et américaine» de la Française d'origine africaine Niagalé Bagayoko-Penone, édité par L'Harmattan... et financé par le ministère français de la Défense, qui endosse de ce fait des vérités généralement attribuées avec dédain aux «extrémistes proches de Gbagbo». «La posture politico-diplomatique de la France en Afrique de l'Ouest s'est articulée autour de trois axes majeurs: la conservation de liens privilégiés avec les pays francophones de la sous-région; la lutte en sous-main contre l'influence du Nigeria dans la zone; le contrôle des mécanismes multilatéraux à la fois économiques et sécuritaires mis en place à la fin des années 1970.» Vous lisez bien: la guerre d'influence contre le Nigeria est un des trois axes fondamentaux de la politique de la France en Afrique de l'Ouest.

    Et pourquoi donc ? Niagalé Bagayoko-Penone (qui, il faut insister, a reçu le prix 2003 de la recherche universitaire décerné par l'Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale en France), répond à cette question et indique pourquoi la France a déclenché la guerre du Biafra qui a fait près de 3 millions de morts. «Le privilège accordé à la relation avec les pays francophones d'Afrique de l'Ouest a pour corollaire les rapports difficiles entretenus avec la puissance anglophone de la sous-région, le Nigeria, perçu à la fois par les décideurs français comme le héraut des positions anticolonialistes et panafricanistes et comme le chantre d'une politique révisionniste tendant à remettre en cause le principe d'intangibilité des frontières [NDLR: on remarquera l'inanité de cette dernière thèse puisque le Nigeria n'a jamais participé à une aventure sécessionniste ou expansionniste à cette date, et que la France donnera le coup d'envoi en soutenant les indépendantistes biafrais]. Réciproquement, les dirigeants nigérians successifs ont toujours vu dans la présence de la France, et plus largement des anciens Etats tutélaires, un obstacle à l'affirmation de leur puissance sur la scène régionale.


    La réduction de l'influence française sur les pays francophones d'Afrique de l'Ouest a constitué l'un des axes traditionnels de la politique du Nigeria. Dès 1961, les relations entre les deux Etats se détériorent lorsque le gouvernement nigérian décide de suspendre les relations diplomatiques afin de protester contre les essais nucléaires engagés par la France au Sahara. C'est au cours de la guerre du Biafra que la dégradation des relations atteint son paroxysme, la France, par le biais de la Côte d'Ivoire et du Gabon, apportant son soutien à la sécession biafraise, menée par le lieutenant-colonel Odumegwu Ojukwu, et demeurant le principal fournisseur du Biafra, toujours via la Côte d'Ivoire et le Gabon, malgré l'embargo décidé en juin 1968 et bien que les traités de coopération militaire franco-ivoirien et franco-gabonais interdisent la réexpédition des armes fournies par la France à un pays tiers. La position du Général de Gaulle semble avoir été inspirée par des motivations comparables à celles qui avaient précédemment guidé son attitude dans la sécession katangaise, notamment la rancune nourrie à l'encontre de la Grande-Bretagne. Le souci majeur était cependant de réduire la taille du géant nigérian, susceptible d'attirer dans son orbite les petits Etats francophones voisins.» Rarement dans l'histoire du continent un Etat occidental se sera acharné avec tant de hargne contre une Nation sous-développée !


    La CEDEAO sous le feu de la France

    Après la guerre du Biafra, le leader nigérian (et panafricain) Yakubu, prend conscience de la nécessité pour l'Afrique de l'Ouest de s'unifier pour ne plus faire face à des souffrances telles que celles que le Nigeria a endurées. C'est d'ailleurs pour cette raison que la CEDEAO est créée, et combattue violemment par la France. Niagalé Bagayoko-Penone raconte: «A l'issue de la guerre civile nigériane, c'est par le biais de canaux multilatéraux que la rivalité franco-nigériane a continué de s'affirmer. La France a ainsi soutenu la création, à Bamako, en 1972, de la CEAO (Communauté des Etats d'Afrique de l'Ouest), exclusivement francophone, composée de la Côte d'Ivoire, du Sénégal, du Bénin, du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie et du Niger: l'objectif tacite était de parvenir à former un bloc uni contre le Nigeria. Le Togo et la Guinée se bornèrent à occuper des sièges d'observateurs au sein de l'organisation. En 1975, sous la houlette du leader nigérian Yakubu Gowon, mais aussi du Togo, est lancée la création de la CEDEAO (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) que rejoignent l'ensemble des pays de la CEAO ainsi que le Cap Vert, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Nigeria et la Sierra Leone: la naissance de la CEDEAO est ainsi en partie une réponse à celle de la CEAO.».

    La CEDEAO développe assez vite un programme ambitieux et se dote d'outils pertinents qui, s'ils avaient été mis en œuvre, auraient empêché la «guerre-feu-de-brousse» qui a ravagé le Liberia, la Sierra Leone et maintenant la Côte d'Ivoire. Ces instruments sont le Protocole de Non-agression et le Protocole d'Assistance mutuelle en matière de sécurité (PAM). L'organisation régionale met en place une force d'intervention rapide: l'ECOMOG. Elle est censée venir préserver la paix et la légalité partout où elles sont menacées. De nombreux obstacles viennent rendre difficile l'action de l'ECOMOG sur les terrains du Liberia et de la Sierra Leone, où une entreprise rebelle internationale attaque les Etats constitués. D'abord, des Etats de la CEDEAO comme le Burkina Faso de Blaise Compaoré et la Côte d'Ivoire d'Houphouët-Boigny s'affranchissent des règles communément adoptées pour soutenir l'action de Charles Taylor et de sa filiale sierra léonaise, le Front révolutionnaire unifié (RUF) de Foday Sankoh.

    Ces violations des règles communes sont activées par la France, comme le souligne Niagalé Bagayoko-Penone: «La France a fermé son ambassade à Monrovia au début du conflit libérien mais, parallèlement, a incontestablement soutenu en sous-main ses alliés traditionnels dans leur tentative d'influencer sur le cours des conflits libérien et sierra-léonais. Elle s'est en effet discrètement impliquée aux côtés de Charles Taylor, en donnant carte blanche au Burkina Faso et à la Côte d'Ivoire pour soutenir le NPLF, en lutte, selon son analyse, contre les forces relevant de la sphère d'influence anglophone. Taylor a notamment su exploiter les inquiétudes de Paris quant au rôle prédominant joué par le Nigeria au sein de l'ECOMOG.

    Les responsables politiques français considéraient l'intervention du Nigeria au Liberia à l'aune du conflit de Bakassi entre le Nigeria et le Cameroun, membre de la sphère d'influence française. Par extension, la prédominance militaire du Nigeria dans l'opération multinationale menée au Liberia et les rumeurs selon lesquelles les forces nigérianes vendaient des armes et fournissaient un soutien logistique aux combattants anti-NPLF ont conduit les responsables français à envisager de faire valoir leurs intérêts sous la couverture des forces de Taylor.

    La France est également apparue à travers l'implication de divers acteurs économiques, sans qu'il soit possible de déterminer la part exacte prise par les autorités gouvernementales. Ainsi, outre le rachat des exportations clandestines de bois, on retrouve des intérêts français dans l'exploitation du fer du mont Nimba: engagés dans le projet MIFERGUI, qui prévoyait l'exploitation du gisement de fer guinéen de Mifergui et l'exploitation du minerai par la ligne de chemin de fer Yekeba-Buchanan, Usinor a continué à se procurer du fer dans le Taylorland, après le déclenchement des hostilités.

    Le refus de la France d'appuyer les critiques des Nations Unies sur les conséquences environnementales du projet NIMCO (de construction d'une ligne de chemin de fer desservant le port de Buchanan) a démontré l'importance des intérêts commerciaux français et expliqué les efforts discrets de Paris pour gêner les tentatives de l'IGNU pour mettre un terme aux affaires menées par Taylor. En 1992, c'est encore la France qui a bloqué la résolution du Conseil de Sécurité visant à imposer les sanctions aux factions libériennes.»

    Les échecs de l'ECOMOG sont également liés à des considérations internes au Nigeria. La faillite progressive de l'Etat se manifeste par des pouvoirs militaires prédateurs, dont le plus caricatural est celui de Sani Abacha.
    C'est justement sous le règne de ce dictateur que la France amorce un rapprochement spectaculaire avec son ancien ennemi structurel. Paris profite de l'isolement international du Nigeria et de la réprobation de ses alliés atlantistes traditionnels (Grande-Bretagne et Etats-Unis) quant aux choix politiques de la junte et à sa rapacité sans limites. Le Nigeria est-il exclu du Commonwealth ? La France l'accueille dans la Francophonie, à tel point que Sani Abacha adopte le français comme deuxième langue officielle. Les contrats pétroliers les plus appétissants sont signés par Total.


    Obasanjo et l'impérialisme américain !

    A priori, cette alliance de circonstance se modère lorsque Sani Abacha meurt et qu'Olusegun Obasanjo gagne les élections. Les grandes nations espèrent en un relèvement du géant démographique de l'Afrique, et accourent au chevet du Nigeria, qui peut ainsi sortir d'un tête-à-tête aliénant avec une France qui profitait de ses difficultés. C'est la consécration diplomatique d'Obasanjo, qui est coopté pour être un des acteurs de premier plan du NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique) et se présente comme l'interlocuteur numéro un des Etats-Unis en Afrique de l'Ouest. Mais Obasanjo contrarie les espoirs placés en lui. Il n'arrive pas à restaurer l'autorité de l'Etat dans le Nord du pays contrôlé par les islamistes. Ses alliés américains s'en plaignent et vont jusqu'à assimiler son laxisme à de la complaisance, voire à de la complicité. La lutte contre la corruption se résume, selon certains de ses partenaires, à des effets d'annonce et à un habillage cosmétique. La dette internationale étrangle le Nigeria.

    Progressivement, Olusegun Obasanjo se rapproche de nouveau des Français qui ont tant aidé un Sani Abacha qui l'avait mis en prison. Ils ne sont pas très exigeants, et le président nigérian peut tirer des dividendes d'une cogestion dans laquelle les intérêts stratégiques globaux de la France et les intérêts étriqués du clan Obasanjo sont les points de départ des «deals». La stratégie nigériane, sans doute conçue progressivement, en fonction des «propositions indécentes» successives de Paris, peut se résumer ainsi. Au départ, le Nigeria se met en travers du chemin de la France, de manière frontale; puis il négocie son retrait ou sa mise au service d'intérêts qui ne sont pas ceux de son peuple.


    Les manœuvres d'Obasanjo en Côte d'Ivoire et au Togo !

    Ainsi de la crise ivoirienne. Dès le déclenchement des hostilités, le Nigeria fait atterrir des avions Alphajets en Côte d'Ivoire au nom du Protocole d'assistance mutuelle. Mais refuse de les faire décoller, et entre dans des négociations tendues avec une France qui prend le sommet d'Accra I, organisé à l'initiative de la CEDEAO, pour une bravade, alors que Paris appuie des négociations à Marrakech sous l'égide de la Françafrique maçonnique (Omar Bongo, Sassou N'Guesso, Compaoré...). Obasanjo tance un moment Abdoulaye Wade, qui travaille ouvertement pour Paris dans le cadre du conflit ivoirien. La France ne renonce pas: elle le travaille au corps et lui promet monts et merveilles, notamment un siège africain au Conseil de sécurité de l'ONU. Elle joue sur son orgueil blessé: Obasanjo se rend compte qu'il ne peut plus tout obtenir de Gbagbo épuisés par ses conseils sans suite.

    Il soupçonne progressivement le leader ivoirien d'avoir offert à Thabo Mbeki des concessions qu'il ne lui aurait pas accordées...Sur ce, arrive l'affaire togolaise, avec la mort de Gnassingbe Eyadema et le coup d'Etat constitutionnel de son fils Faure. Obasanjo, président en exercice de l'Union africaine, lève le ton et demande un rétablissement de l'ordre constitutionnel, menaçant à mots couverts la junte civilo-militaire d'une intervention militaire. Galvanisé par son discours démocratique, le peuple togolais défie la dictature dans la rue, et vomit ouvertement la France chiraquienne, qui la soutient. Ce n'est que le temps d'un «deal» avec la France.

    Une fois l'accord secret conclu, le président nigérian tourne casaque. Il accompagne le coup d'Etat électoral de Faure Gnassingbe, s'acharnant contre Alpha Oumar Konaré, qui maintient la ligne démocratique originelle -par conviction démocratique ou par sensibilité partisane, c'est selon. Les patriotes togolais n'ont que leurs yeux pour pleurer. Quelques semaines plus tard, le président Olusegun Obasanjo est reçu en France en visite officielle, où il obtient l'annulation totale de la dette de son pays et des nouveaux contrats entre le Nigeria et Total, dont les détails ne sont pas connus.


    L'opération togolaise s'est si bien déroulée que c'est encore à Obasanjo que la France, dont les féaux naturels -Omar Bongo, Abdoulaye Wade ou Blaise Compaoré -sont de toute façon discrédités, fait appel pour torpiller la médiation de Thabo Mbeki et empêcher le désarmement des rebelles. Le président nigérian réagit immédiatement, même s'il n'ose pas attaquer directement son homologue et se contente d'entrer dans des schémas où l'intoxication médiatique le dispute au flou artistique. Président en exercice à l'UA, il se comporte de fait comme un ennemi de cet ensemble et comme le leader naturel de la CEDEAO (le président en exercice, Mamadou Tandja, n'étant même pas présent lors de la réunion qui remet en selle l'organisation ouest-africaine). Qu'importe: il a réussi à transformer l'organisation créée par son prédécesseur Yakubu Gowon pour contrecarrer des initiatives déstabilisatrices venues notamment de la France, en instrument de validation des manœuvres subversives des pions de l'Hexagone.

    Quel est cette fois-ci la monnaie d'échange ?

    De nombreux observateurs pensent que le président nigérian négocie avec la France la poursuite d'une imposture: alors que dans l'affaire de la presqu'île qui oppose son pays au Cameroun, la Cour Internationale de Justice a donné raison au Cameroun, les troupes nigérianes tardent à se retirer, grâce à la complicité de Jacques Chirac - la France est liée par un accord de défense avec le Cameroun, et peut donc raisonner le Nigeria -et de Kofi Annan -qui noie l'arrêt de la CIJ dans de nombreux pourparlers entre les présidents camerounais et nigérian, alors qu'il n'y a plus rien à négocier, mais une décision de la justice internationale à faire appliqué. Le Nigeria négocie-t-il une baisse du soutien français au Cameroun, qui lui permettra de commencer à exploiter le pétrole de Bakassi, sous des sociétés écrans ? L'avenir nous le dira. Comme l'avenir nous dira si ses manœuvres auront raison de la détermination de l'Autre Afrique incarnée par le président Thabo Mbeki.


    L'introduction et les sous titres sont de la rédaction de www.togoenlutte.org

    Bruxelles, le 31 mai 2008

    Le Front des Organisations Démocratiques Togolaises en Exil

    Courriel: postmaster@togoenlutte.org

    Infos: www.togoenlutte.org

    Source: Le Courrier d'Abidjan 28/9/2005

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