• URANIUM: Le business au défi des droits de l’homme

    URANIUM: Le business au défi des droits de l’homme
    19 mai 08 - Les multinationales qui opèrent dans les pays sensibles sont régulièrement accusées de violer les droits de l'homme. Portent-elles le chapeau pour d'autres, notamment les gouvernements ? Débat entre entreprises, ONG et organisations internationales

    Isolda Agazzi/Infosud - Ron Popper, haut cadre de ABB, a le sens de la formule : « Sans les droits de l'homme, la responsabilité sociale des entreprises n'est qu'une opération de relations publiques ! » Une déclaration à laquelle semblaient souscrire les participants de la rencontre organisée, le 14 mai, à Genève par "Tribune des droits humains". Un débat constructif, mais sans fard, entre ONG et multinationales, des acteurs peu habitués à s'affronter à la lumière des médias.

    « Oui, mais la responsabilité des entreprises va au-delà des droits de l'homme : ça comprend aussi les droits syndicaux et la protection de l'environnement » renchérit Anne-Kathrin Glatz, de la Déclaration de Berne (DB). Pour qui la situation n'est pas rose. « Dans les années 70, l'ONU a essayé d'élaborer une convention sur les multinationales. Pendant les vingt années suivantes, avec les Etats-Unis qui bloquaient le dialogue Nord - Sud, il y a eu une véritable régression. Et depuis la fin des années '90, on assiste à beaucoup de rhétorique, mais peu de mise en pratique. Le Pacte global de l'ONU est très faible et il ne sert qu'à blanchir es entreprises qui y participent. C'est-à-dire à leur donner une bonne image. »

    Des faits, pas des opinions

    Jacques - Emmanuel Saulnier, représentant d'Areva - décorée par la DB du Public Eye Award 2007, le prix de l'entreprise la plus irresponsable de l'année, pour ses activités d'extraction d'uranium au Nord du Niger - n'est pas d'accord. « Le monde n'est pas noir ou blanc et une entreprise doit faire face à la concurrence et à la mondialisation. » Il explique que le géant français du nucléaire organise toujours des rencontres avec les parties prenantes pour discuter santé, sécurité au travail, sécurité nucléaire, empreinte environnementale, ressources humaines. « Je vous invite à venir voir nos activités au Niger de vos propres yeux ! » lance-t-il à sa voisine.

    Anne-Kathrin Glantz reconnaît que le prix a été décerné sur la base des informations fournies par l'ONG nigérienne Aghirin'man et sur les études d'un institut français indépendant qui a constaté des taux excessifs de radioactivité. Salil Tripathi, de International Alert, met le doigt dans la plaie : "Admettons que vous acceptiez l'invitation d'Areva, comment allez-vous financer votre voyage au Niger ? Allez-vous accepter leur argent ? Il est très complexe de surveiller les abus commis par les multinationales : même si on avait les moyens de le faire - ce qui n'est pas le cas - comment structurer le processus ? Il y aura toujours de gros conflits d'intérêt. »

    Malgré la difficulté, le chercheur s'empresse de lancer un appel : « Les ONG doivent se baser sur les faits. Elles doivent demander aux médias d'enquêter, car toutes les entreprises et tous les gouvernements ne sont pas méchants. Et les médias ne doivent pas prendre les rapports des ONG tels quels, mais croiser les informations et lire les rapports des gouvernements aussi. Ils doivent se baser sur les faits, non sur des opinions. »

    Après les multinationales, les entreprises d'Etat

    Salil Tripathi rappelle que la question de la complicité est très complexe : « Les multinationales ne violent jamais directement les droits de l'homme. Mais on a tendance à leur faire porter le chapeau pour des crimes commis par les forces de sécurité de l'Etat. On accuse ABB de complicité dans la guerre du Soudan car, si on lui écrit, elle répond, contrairement au gouvernement soudanais. Ceci n'enlève rien à la responsabilité des multinationales, qui est lourde - voyez les pétroliers chinois au Soudan. Mais parfois les compagnies occidentales n'ont pas d'autre choix que d'être dans un pays donné et, si elles se retirent, elles sont aussitôt remplacées par les Chinois et les Indiens. Quand la canadienne Talisman s'est retirée du Soudan, la situation des droits de l'homme ne s'est ni détériorée , ni améliorée. »

    Ce spécialiste affirme que les abus commis par les multinationales sont bien documentés, mais celles-ci ne représentent que 10% de l'emploi mondial : « On ne dénonce jamais les dérives des entreprises d'Etat et du secteur informel. Personne ne parle des milliers de morts dans les mines chinoises. »
    source: droitshumains-geneve.infos

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