Tandja entendra-t-il la voix du " pays réel" ?

Le peuple nigérien, et particulièrement la société civile, ne se laisse pas faire. Visiblement, qui veut attenter à la démocratie la trouvera sur son chemin. Un rapide aperçu de son parcours suffit pour renseigner sur son refus d’assister en spectateur passif aux uppercuts préparés contre la démocratie. Et la dernière "insoumission" en date n’est pas passée inaperçue. Aux marches de soutien appelant Mamadou Tandja à succéder encore à lui-même, ont été opposées des contre-marches mettant en garde le président nigérien contre toute tentative de modification de la Constitution qui lui ouvrirait, pour la troisième fois, les marches de la présidence.

Le peuple nigérien montre ainsi qu’il se tient toujours debout, l’arme au pied, sans jamais manquer d’agir, même à visage découvert. Une preuve de courage et de détermination s’il en est, dans une Afrique où la tendance est généralement au laisser-faire si ce n’est à la résignation, face aux nombreuses turpitudes de ses dirigeants. Qu’il soit d’ailleurs ou d’Afrique, chaque peuple a la démocratie qu’il mérite. Le peuple nigérien, quant à lui, continue de s’exprimer. Il est déjà heureux qu’il ne soit pas l’objet d’une répression féroce, comme on en voit dans bien des Etats du continent. A présent, tout le monde sait que l’unanimité n’est pas faite autour d’un troisième mandat de Mamadou Tandja. La volonté populaire s’exprime, c’est un bon indicateur pour qui a encore des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. Quelle posture adoptera le président si l’écrasante majorité des Nigériens lui indiquaient clairement qu’il rame à contre-courant des aspirations du peuple, en s’octroyant un nouveau bail ? La caravane Tandja passera-t-elle tranquillement si les aboiements du peuple nigérien se font plus persistants ? Tout ce qui reste à espérer, c’est que le président nigérien entende la voix du peuple, et en l’occurrence, celle du "pays réel" généralement plus sincère. En tout état de cause, les différentes manifestations au Niger marquent un niveau de conscience citoyenne suffisamment fort du peuple nigérien. D’autant plus que ce peuple n’a pas attendu que les politiciens lui montrent la conduite à tenir. Il a dit ce qu’il pense et veut visiblement s’assumer. On peut dire que c’est de bonne guerre, les oppositions sous les cieux africains ayant par mille fois, prouvé qu’elles étaient plus accrochées à leur intérêt personnel qu’à celui général du peuple. La lutte est désormais engagée entre les pro et les anti "Tandja III". Le président nigérien pourrait-il avoir à reculer ? Si tout ne dépend pas toujours des rapports de force en présence, il reste que si la mobilisation populaire contre une tentative de révision de la Constitution grandit et se maintient, cela aura au moins pour effet d’attirer l’attention de la communauté internationale sur les dangers qui guettent ce pays. Et la conduite qu’elle adoptera témoignera de son sens de responsabilité dans cette chronique annoncée d’une situation nationale qui pourrait faire très mal au Niger.

Par Cheick Beldh’or SIGUE, Le Pays(Burkina Faso)