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Par Chérif Elvalide Sèye, Dakar
Il n’y a déjà plus de parlement. Peut être, bientôt, plus de gouvernement et de Constitution. Le président Mamadou Tandja poursuit sa fuite en avant. Contesté par une frange de son propre parti, le Mouvement national pour la société de développement, certains des partis de sa majorité, les syndicats, la société civile, et désavoué par la cour constitutionnelle, Tandja a franchi une étape supplémentaire dans une stratégie bien incompréhensible.
Toutefois, ce nouveau pas semble lui avoir été imposé par la tournure des événements. L’avis négatif de la Cour constitutionnelle, qui a estimé que le référendum pour changer la Constitution constituait une violation de son serment de chef d’Etat, exposait le général à un procès pour haute trahison. Pour éviter tout risque avec un Parlement qui a déjà traduit son ancien Premier ministre Hama Amadou devant la Haute cour de justice, après l’avoir renversé par une motion de censure surprise, le président a donc choisi de dissoudre l’Assemblée.
Le parlement dissous le 26 mai dernier, des élections législatives qui devaient se tenir en novembre prochain doivent être, selon la constitution, organisées dans 45 jours au moins et 90 au plus. Reste à savoir si Tandja va les organiser avant ou après son référendum. Vraisemblablement, il ne devrait pas courir le risque de les organiser avant son référendum. Rien ne lui garantit une nouvelle majorité. Mais, selon le constitutionnaliste nigérien, Oumarou Nare, interrogé ce jeudi 28 mai par RFI, le décret de convocation du collège électoral pour le référendum peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir auprès de la Cour constitutionnelle. L’issue en serait connue puisque la Cour a déjà émis un avis défavorable sur le référendum. Il s’ensuivrait un blocage institutionnel et il ne resterait au Président qu’un coup de force pour passer outre.
Blocage institutionnel ?
Cela rappelle de douloureux souvenirs. En 1996, la cohabitation heurtée entre le président de la République, Mahamane Ousmane, et le Premier ministre, Hama Amadou, sortie des urnes après la dissolution de l’Assemblée avait paralysé l’Etat. Pendant dix-huit mois, plus de conseil des ministres, plus de promulgation de lois, nominations contestées etc. Pour y mettre un terme, le chef d’Etat major, Baré Maïnassara, avait mis tout le monde d’accord en prenant le pouvoir le 27 janvier 1996. Il avait pensé fermer ensuite la parenthèse en se faisant élire le 7 juillet 1996. Mais, hélas pour lui, le 9 avril 1999, il tombe sous les balles d’éléments de sa propre garde présidentielle dirigés par le chef de bataillon Daouda Malam Wanké.
Au Niger, ce souvenir qu’on voulait enterré hante de nouveau. « Il est clair que le chef de l'Etat vient d'ouvrir grandement la porte à la dérive autoritaire », a affirmé Issoufou Sidibé, secrétaire général de la Confédération démocratique des travailleurs du Niger (CDTN), l’une des principales centrales syndicales, membre du Front pour la défense de la démocratie (FDD), qui s’est constitué pour s’opposer au coup de force du général. Il est vrai que, faute de légalité, Tandja ne peut plus que s’enfermer dans une logique autoritaire.
La force appelle la force
La force devient son seul recours. Mais la force appelle la force. Sous le régime militaire du président Seyni Kountché, Mamadou Tandja faisait partie de l’aile dure. Le jeu démocratique qu’il a accepté en briguant le suffrage des électeurs, semblait l’avoir définitivement guéri. Sa détermination à passer en force accrédite l’idée que la conversion n’était que de façade. Le marché de Niamey a brûlé mercredi. C’est à la fois, le cœur et le symbole de la capitale d’un pays très commerçant. Mauvais présage pensent plus d’un. C’est, à nouveau, la montée des périls sur les bords du fleuve Niger.
Les Afriques