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Actualités politique, économique et culturel de la communauté touareg.

Boycott des législatives au Niger

Participer à des législatives, sur les cendres encore fumants de l’ancien parlement détruit par le pouvoir, équivaut, pour le FDD, à se renier totalement, à accorder sa bénédiction à la nouvelle assemblée nationale, et surtout à reconnaître de facto le régime de Tandja. Les opposants au Tazarché ont d’autant plus raison de prendre leurs distances vis-à-vis du pouvoir en place qu’ils sont l’objet désormais d’une chasse aux sorcières. Le président Tandja n’entend nullement reculer, et après avoir usé de contorsions juridiques pour arriver à ses fins, il n’hésite plus à manier du gourdin pour réduire au silence ceux qui contestent sa légitimité. Comment envisager une réconciliation sous une telle chape de plomb ? L’opposition voudrait faire des compromis qu’elle ne le pourrait, parce que poussée, à son corps défendant, dans ses derniers retranchements. Première victime du nouveau visage de Tandja III, le porte-parole du FDD, Marou Amadou. Le traitement infligé à cet intrépide activiste de la société civile est symptomatique du nouveau climat de terreur qui règne au Niger. Depuis le 4 août, il est né un Etat répressif où la loi de la force prime désormais sur la force de la loi. En cherchant à casser moralement (et peut-être physiquement) Marou Amadou, le pouvoir veut briser le coup du mouvement de contestation et éviter qu’il n’installe durablement la chienlit dans le pays. Tandja pourra-t-il intimider et réduire au silence les anti-Tazarché ? Une chose est sûre, c’est un pays divisé qui se présente aux yeux du monde. Le pays des partisans de Tandja et de sa nouvelle Constitution, et le pays des autres. Un fossé béant les sépare, sans qu’on ne sache comment ils peuvent se reconstituer. C’est ce flottement institutionnel, avec la non reconnaissance de son pouvoir par une frange importante du pays, qui semble le plus énerver Tandja. Il doit avoir cette fâcheuse impression de ne pas être le seul capitaine à bord, lui l’ancien officier forgé dans la discipline des armées, lui l’ancien président démocratiquement élu qui était respecté. Il y a une sorte de dyarchie au Niger que Tandja ne peut supporter. D’autant que, pour enfoncer le clou, dans leur stratégie de contestation, les opposants ont décidé de réactiver le parlement dissout. Peut-être ressusciteront-ils aussi les autres institutions démantelées par le président Tandja dans sa boulimie du pouvoir ? Dans les décombres de la défunte Ve République, il y a en effet la Cour constitutionnelle, la CENI et même la présidence de la République précédemment régies par la Constitution consensuelle du 9 août 1999.

En tout état de cause, les adversaires de Tandja doivent assumer la position qu’ils ont prise de refuser le bradage de la démocratie nigérienne. Mais cette posture a un coût. Outre les tracasseries policières et juridiques inhérentes à de tels engagements, les partis politiques d’opposition pourraient voir l’ensemble des institutions leur échapper, à commencer par le parlement. S’ils pratiquent la politique de la chaise vide aux législatives à venir, ces partis laissent le champ libre aux partisans de Tandja. En même temps, ils risquent de se couper momentanément de leurs bases, en ne battant pas campagne. Le boycott des élections est donc un couteau à double tranchant. Cela s’est vu dans d’autres pays en Afrique, où ce type de boycott n’a nullement ébranlé la sérénité du pouvoir. Les opposants sénégalais, pour prendre un exemple relativement récent, en savent quelque chose. Après s’être mis longtemps en marge des institutions, ils ont dû y revenir, en prenant part aux dernières élections locales. L’opposition nigérienne résistera-t-elle aux manœuvres de Tandja ? Réussira-t-elle à le ramener à la raison ? Ou alors sera-t-elle finalement comme toutes les autres oppositions, obligée de reconnaître Tandja et "sa" Constitution ? L’avenir du Niger demeure plus que jamais écrit avec des points d’interrogation.

Le Pays 

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