• Tinariwen - Le blues des Touaregs

    Les Tinariwen, ceux du désert, ont inventé le blues, leur blues, sans savoir que le genre avait fait des petits dans le Nouveau Monde. Figures emblématiques de la résistance touarègue, ils avaient troqué leurs armes pour les guitares après avoir embrassé la rébellion de leur peuple.

    Et aujourd'hui, ces fils de l'errance sont devenus des icônes de la musique africaine sur la scène internationale. Ils s'arrêtent ce soir à La Tulipe pour offrir le répertoire de Imidiwan: companions, un disque qui marque un retour aux sources. 

    L'album fut enregistré dans un studio mobile à Tessalit, dans la région de Kidal au nord du Mali, en plein coeur du Sahara, où les musiciens habitent depuis deux décennies après avoir vécu dans les camps de réfugiés en Libye. «Chez toi, tu as beaucoup plus de chances d'avoir l'esprit tranquille et de capter pas mal de choses», raconte Abdallah Ag Alhousseyni, chanteur-guitariste qui écrit également pour le groupe de poètes-musiciens.

    Le DVD qui accompagne Imidiwan: companions illustre d'ailleurs très bien l'univers de la création du disque dans le silence et l'immensité de la terre, avec pour tout paysage le sable, les roches et l'austérité. Dans ce contexte, Tinariwen souhaite représenter tous les Touaregs, dont la vie fut morcelée entre le Mali, le Niger, l'Algérie, la Mauritanie et la Libye. «À l'extérieur, les gens pensent que nous n'avons chanté que la résistance, mais nos textes portent également sur une civilisation qui existe depuis des milliers d'années, de même que sur la vie contemporaine. Cette démarche demeure la même depuis nos débuts en 1982», soutient Abdallah Ag Alhousseyni.

    On aborde l'essence de Tinariwen: origine nomade, combat politique et urbanité forcée. Qu'en est-il aujourd'hui? «Notre mode de vie a beaucoup changé. Lorsque, presque chaque année, la sécheresse traverse le désert, les gens vont vers les villes. Après la sécheresse, il est difficile pour eux de récupérer leurs animaux. C'est dur pour le nomadisme», répond le musicien qui chante, tout comme ses collègues, en tamashek, l'idiome touareg. «Pour le moment, la langue se porte bien, mais notre peuple est en danger, comme toutes les minorités du monde.» Et la situation politique actuelle? «De ce côté, il n'y a pas de grandes variations. Ça se calme de temps en temps, mais ça revient toujours. Présentement, des conflits perdurent au Niger et au Mali.»

    Reste cette formidable musique, mélange de plainte ancestrale soutenue par des polyrythmies discrètement obsédantes, de blues rock urbain lancinant aux riffs dévastateurs et d'art troubadour intime aux accents pourtant électriques. Les guitares livrent parfois peu de notes, mais tout réside dans la profondeur de l'instant, de même que dans l'assuf, ce mélange de solitude, d'anxiété et de nostalgie. Ce blues des Touaregs est à la fois terreux, traversé par la soif, engagé, relâché par moments, mais terriblement vibrant.

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    Tinariwen à La Tulipe, ce soir à 20h. Renseignements: 514 790-1245

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    Collaborateur du Devoir
    www.ledevoir.com

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