• SAHEL: Journal du changement climatique au Sahel – 4ème jour

    SAHEL: Journal du changement climatique au Sahel – 4ème jour
    NIAMEY, 9 juin 2008 (IRIN) - Jan Egeland, conseiller spécial du Secrétaire général des Nations Unies sur les conflits, s'est déplacé dans le Sahel la semaine dernière pour attirer l'attention de la communauté internationale sur une région, située à l'orée d'un désert du Sahara en pleine avancée, qui, selon les Nations Unies, subit les conséquences les plus lourdes du changement climatique. Chaque jour, M. Egeland livre à IRIN ses pensées et ses expériences dans un journal dont voici le quatrième volet, rédigé cette fois depuis Niamey, dans l'extrême ouest du Niger.

    « Le Niger, un des pays du monde qui souffrent le plus de la pauvreté et de l'insécurité alimentaire, se trouve également confronté à des difficultés environnementales parmi les plus graves qu'on puisse imaginer. Ses ressources en eau s'amenuisent, sa croissance démographique est spectaculaire, et ses éleveurs et ses agriculteurs se disputent l'exploitation de ses rares terres fertiles ».

    « Nous venons encore de passer une journée très longue et très intéressante, dans une chaleur étouffante. Il faisait 32 degrés [Celsius] lorsque nous avons quitté l'hôtel à Bamako [dans le sud du Mali] à 6 h 30 du matin, et quand nous sommes arrivés à Niamey, vers midi, il faisait déjà 42 degrés ».

    « Nous avons commencé directement par une longue réunion avec Mamadou Tandja, le président nigérien, au cours de laquelle nous avons débattu des difficultés extrêmement graves auxquelles le Niger se trouve confronté ».

    « J'ai insisté sur l'importance d'un dialogue avec les éleveurs vulnérables, comme les Touaregs, et j'ai souligné que les Nations Unies étaient toujours disposées à apporter leur aide au Niger et à son peuple, et notamment à tenter de relever les défis que posent la détérioration de l'environnement, le changement climatique et la prévention et la résolution des conflits ».

    « Le Président a souligné les problèmes de sécurité extrêmement graves que cause le trafic de drogue et d'armes, qui, selon lui, s'établit de plus en plus ; il pense qu'en matière de développement et de changement environnemental, la communauté internationale parle beaucoup, mais agit peu ».

    « Après la rencontre avec le Président, nous sommes directement allés à une réunion avec l'équipe nationale des Nations Unies, au cours de laquelle [les représentants de] l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture [FAO] et [du] Programme alimentaire mondial [PAM] nous ont parlé de l'insécurité alimentaire extrême du Niger. Des dizaines de milliers de personnes se retrouvent une nouvelle fois dans une situation nutritionnelle critique, cette année, et des millions de personnes vivent dans des conditions d'insécurité alimentaire ».

    « [Nous avons visionné] un nouveau film réalisé par les Nations Unies au Niger, qui montrait la situation désespérée de certains éleveurs d'ici. Dans ce film, les éleveurs disaient "vivre en cage", parce qu'ils ont de moins en moins de pâturages à exploiter, les terres étant consacrées à l'agriculture et ce qu'il en reste étant sans cesse un peu plus grignoté par la désertification ».

    « Finalement, accompagnés du ministre de l'Environnement, nous sommes allés voir quelques projets environnementaux mis en place près de Niamey, que le gouvernement finance avec une partie des fonds qu'il consacrait auparavant au remboursement de la dette ».

    « Pour moi qui suis norvégien, il était assez éprouvant de passer une journée ainsi, par 44 degrés, sous un soleil de plomb, mais cela nous a permis de voir très clairement comment le fleuve Niger, qui donne vie à une bonne partie du pays et, bien sûr, de la région, est en train de disparaître ».

    « De vastes régions qui étaient autrefois toujours sous les eaux sont aujourd'hui totalement asséchées, même lorsque les communautés riveraines s'efforcent de les sauver ».

    « [Les habitants] ont creusé des tranchées dans des terres stériles, totalement rongées par les crues éclairs et les sécheresses graves. Lorsque la saison des pluies arrivera, ces tranchées retiendront l'eau pendant plus longtemps pour permettre à la végétation de pousser, tout en empêchant les crues de provoquer un déversement supplémentaire de sable dans le fleuve ».

    « Le fleuve a trois problèmes : d'abord, en raison de la diminution des précipitations, provoquée par le changement climatique, moins d'eau s'y déverse ; ensuite, l'explosion démographique se traduit par une utilisation accrue de l'eau pour l'irrigation et la consommation humaine ; enfin, avec la désertification et la dégradation de l'environnement, les voies d'eau s'envasent ».

    « Globalement, il s'agit là encore d'un douloureux rappel de la manière dont la dégradation de l'environnement et le réchauffement climatique tuent la vie dans ce pays ; de la façon dont l'humanité lutte face au changement climatique ».

    « La journée s'est terminée dans un cinéma en plein air, où nous avons vu les deux vainqueurs du festival du film environnemental de Niamey. Une nouvelle fois, nous avons vu les images de ces femmes des villages asséchés du Sahel, qui doivent parcourir à pied des distances toujours plus longues pour aller chercher une eau dont la qualité est de moins en moins bonne. Ensuite, nous nous sommes effondrés à 11 heures du soir ».

    « Demain [le 6 juin], nous nous lèverons une fois de plus très tôt, à cinq heures du matin, pour monter à bord d'un avion qui nous emmènera plus de 1 000 kilomètres à l'est, presque à la frontière tchadienne ; là-bas, nous verrons le lac Tchad, un grand lac dont les eaux se sont infiltrées jusque dans les profondeurs des terres nigériennes pendant plusieurs centaines d'années, et qui aujourd'hui a totalement disparu ».

    nr/vj/aj/he/nh/ail
    IRIN News

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