• Niger : Une République à deux vitesses

    Le samedi 15 août 2009, la nouvelle Cour constitutionnelle a validé les résultats du référendum du 4 août, consacrant ainsi la nouvelle Constitution concoctée par le président nigérien, Mamadou Tandja, qui peut désormais faire de vieux os au pouvoir. Mais les opposants, notamment la CFDR (Coordination des forces démocratiques et la République), ne l’entendent pas de cette oreille. Pour eux, cette Cour est illégitime parce qu’ayant illégalement pris la place d’une autre qui, elle, comme une épouse légitime, avait eu la sanctification d’un maire.

    Ils ont donc invité les populations, qui ont dit « non » le 4 août, à sortir dans la rue le manifester bruyamment au cours de cette semaine. En bon shérif du Far West d’antan, le porte-parole du gouvernement, Mohamed Ben Omar, a déclaré « hors la loi » les opposants qui ne se soumettraient pas aux lois et règlements de la République et que ces derniers risqueraient de finir au bout de la corde d’une potence. Car cette juridiction ne tire pas sa légitimité de l’opposition mais « de la Constitution et du Président de la République, à qui la Constitution a donné des prérogatives… » Des prérogatives qui lui permettent de se soustraire aux décisions de ladite Cour, même si, selon Ben Omar lui-même, lesdites décisions « s’imposent à tous. » Ben Omar précise qu’il n’a pas inventé ce qu’il raconte, mais que c’est la Constitution, la nouvelle, qui le dit. Comme si un hennissement différait

    fondamentalement du cheval qui l’a émis ! Du reste, Ben Omar prend le soin d’oublier que la désobéïssance civile est un droit accordé par la même Constitution. Mais il semble qu’au Niger, les interdictions sont bonnes pour les autres et toutes les prérogatives pour Tandja. Seulement, si parmi ces prérogatives, il y en avait une seule qui permettait à Tandja de rassembler son peuple dans la case de l’union, ce serait parfait. Car le Niger donne l’image d’un avion qui se scinde en deux en plein vol, rendant la suite du voyage subitement impossible et dramatique. Une situation qui jette une ombre sur ce fameux « oui massif. » Si on s’en tient au taux de participation de 68 %, cela laisse toujours une marge de 32 % de Nigériens dont les protestations seraient capables d’infliger de sévères insomnies à Tandja. Si c’est cependant 95 % des Nigériens qui ont dit non, le pasteur Tandja est en train alors de conduire au pâturage quelques têtes, le gros du troupeau se dispersant à travers champ.

    Une République ne signifie certes pas forcément l’approbation de tous. Mais elle suppose toutefois un minimum d’entente sur l’essentiel, c’est-à-dire la Constitution. Une nation, divisée sur ses lois fondamentales, risque de prendre le chemin de l’anarchie et de la déchéance. Il est plausible que le Niger veuille changer de système politique et dans ce cas, il n’y a pas de nouveau-né sans douleur. Mais lorsque la douleur peut conduire à la mort du nouveau-né et de la mère, la raison commande d’aviser...

    Le pays.bf

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