• "Les députés nigériens sont insensibles à la misère du peuple"

    Une nouvelle loi sur le statut du député, qui multiplie les avantages financiers des législateurs, scandalise la population et provoque une levée de boucliers de la part des organisations de la société civile nigérienne.


    Une loi dans laquelle il serait même introduit une disposition qui considère le député en pèlerinage à La Mecque comme étant désormais en mission et qui, à ce titre, permet à celui-ci de bénéficier d’une indemnité journalière de 130.000 FCFA, et prévoit 260.000 FCFA pour le président de l’Assemblée nationale. De quoi rendre jaloux les fonctionnaires d’autres institutions de la république nigérienne, qui voudraient bien suivre le chemin argenté tracé par les parlementaires nigériens.

    Dans ce pays où respire la misère et où l’on continue à crier à la faim, on ne pouvait que s’attendre à une telle réaction de la société civile et à des protestations populaires. Il n’y a rien d’étonnant à cela dans la mesure où ce nouveau statut du député aura certainement pour effet de renforcer la fracture entre le peuple et ses représentants. Au moment où des secteurs sociaux comme la santé, l’éducation, l’hydraulique, etc., connaissent des difficultés de fonctionnement faute d’allocations budgétaires suffisantes, le simple citoyen nigérien a tout naturellement du mal à comprendre que des avantages faramineux et autres privilèges soient accordés à ceux qui sont censés défendre ses intérêts. Surtout que les élus du peuple n’étaient déjà pas si mal lotis.

    Quelle autre impression aura-t-il à présent du député sinon qu’il va davantage se déconnecter de ses réalités, et pire, se retrouver carrément sur une autre planète ? Dans ce pays où 60,6 % des Nigériens vivent en dessous du seuil de pauvreté avec moins d’un dollar par jour, les députés nigériens ont-ils fini par perdre de vue les priorités et défis auxquels leur pays est confronté ? En tout cas, tout ce qu’il y avait de plus normal aux yeux du citoyen toujours en attente de conditions de vie meilleures, c’était que ces fonds alloués aux députés, fussent affectés à des domaines prioritaires et d’intérêt public. Ce qui aurait mieux répondu aux attentes du peuple nigérien.

    Evidemment, ces parlementaires nigériens, qui ont leur beefsteak à défendre, ne voient pas les choses de la même manière. Leur nouveau statut n’aurait pas autre but, selon eux, que de valoriser, sécuriser et rendre plus performante la fonction de député. On connaît la chanson. Chose curieuse, ces députés font valoir que cette loi existait depuis 2003. Que la loi ait été conçue par d’autres ou par eux, le contexte reste le même, c’est-à-dire amer : un misérabilisme ambiant et persistant au pays de Seyni Kountché. Une situation qui devait amener les députés nigériens à revoir leurs prétentions à la baisse, à chercher une sorte d’équilibre entre leur rang social et le niveau général de vie du peuple nigérien. Le Parlement nigérien avait tout pour faire la fierté du peuple et de la démocratie au Niger. N’est-ce pas lui qui a été à la base de la motion de censure qui entraîné le départ du gouvernement d’Hama Amadou ?

    A ce même peuple, l’hémicycle montre qu’il est capable du meilleur comme du pire. Et dans le cas d’espèce, on a affaire au pire. Car, une Assemblée nationale vraiment démocratique ne peut s’octroyer de tels privilèges quand elle a en face d’elle, la misère crasse du peuple.

    Et que dit l’opposition parlementaire dans tout ça ? En apparence rien, ou pas grand-chose. Elle n’a vraisemblablement pas craché dans la soupe. Mais qu’ont fait, au juste, les députés ou que prévoient-ils de faire plus qu’ils ne font déjà, pour vouloir s’accorder de telles augmentations ? On n’en sait rien. Mais on sait seulement que le débat sur cette nouvelle loi intervient après le départ de Hama Amadou et quelques mois avant l’organisation du scrutin présidentiel. Les députés récoltent-ils les fruits de l’éjection, par leurs bons soins, de l’ancien Premier ministre ? Le président Tandja pourrait attendre en retour, que ce beau cadeau trébuchant et sonore de fin d’année, conditionne favorablement les mêmes députés qui auraient à se prononcer sur une éventuelle modification de la Constitution. Ce n’est pas une hypothèse à exclure.

    Source: le pays/ Ouagadougou

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