• Le Niger, victime de sa richesse

    Troisième exportateur d'uranium au monde, le Niger est pourtant l'un des pays les plus pauvres du globe. Malgré ses richesses minières, le nord du pays est régulièrement touché par des crises alimentaires et une dégradation de son environnement. Secoué par la rébellion touareg, le pays négocie au prix fort l'exploitation de l'uranium avec les firmes étrangères, dont Areva.

    174éme pays le plus pauvre du monde sur 177, le Niger n'arrive pas à se développer malgré l'éclaircie dans son ciel apportée par la vente d'uranium. Découvert et exploité depuis près de 40 ans, le précieux minerai a pourtant tout du diamant rare. Situé dans la région d'Agadez au nord-ouest du pays, une zone désertique et peu cultivable, il aurait pu la transformer et doper son économie. 

    Un rêve oublié pour les populations du Nord qui estiment ne pas avoir bénéficié de la croissance fulgurante du budget de l'Etat (passé de 15 milliards de francs CFA en 1975 à 72 milliards en 1980). "La répartition des richesses ne s'est pas faite", explique Issouf ag Maha, maire de Tchirozerine, à 45 km d'Agadez et membre du Mouvement des Nigériens pour la Justice (MNJ). "Le gouvernement est le premier coupable dans cette affaire, les entreprises sont venues faire du business et ont agi dans leur intérêt". 

    Les concessions s'étendent sur près de 90 000 kilomètres carrés, et ont fait les belles années de nombreuses sociétés minières. Souvent montrée du doigt, Areva, entreprise spécialisée dans le nucléaire, se défend des accusations de pollution et de néo-colonialisme qui sont portées contre elle. "Dans les années 80, quand les cours de l'uranium se sont effondrés et que les mines fermaient un peu partout dans le monde, le groupe a poursuivi seul l'exploitation des gisements du Niger", explique-t-elle. Sur le terrain, le MNJ assure qu'aucune action n'a été entreprise. "Jamais de concertation avec les populations locales n'a été organisée", ajoute Issouf ag Maha. 

    "La multiplication des permis est notre plus grosse inquiétude"

    Paroles contre paroles, il demeure difficile d'accéder aux sites et de constater scientifiquement les dégâts. Pourtant aux environs, la situation s'est manifestement dégradée. L'élevage et les activités traditionnelles des populations, telles que l'exploitation du sel, seraient devenues impossibles. Dans les fermes, le bruit fait fuir le bétail. Faute d'eau, utilisée pour nettoyer l'uranium, l'agriculture locale est compromise. D'autant que la sécheresse ravage régulièrement cette partie du pays. "Pourquoi ne pas proposer des solutions transparentes avec une explication humaine de l'étendue des projets miniers", s'interroge Issouf ag Maha. 


    La diminution des ressources pétrolières a relancé les cours de l'uranium, ces dernières années. Avec elle, de nouveaux exploitants se sont installés, là où le français Areva détenait le monopole. Fin 2006, la China National Uranium Corporation a reçu un permis d'exploitation du gisement d'Azelik, dans la région d'Agadez. Canadiens, Australiens, Sud-africains, Indiens et Britanniques ont suivi. "La multiplication des permis est notre plus grosse inquiétude", explique Issouf ag Maha. Depuis février 2007, le MNJ et le gouvernement s'affrontent. Composé d'anciens rebelles, de militaires de l'armée régulière et de certains élus locaux, le mouvement attaque les symboles de l'Etat et prend des membres du gouvernement en otage. 

    Tandis qu'Areva a obtenu début février 2009, le permis d'exploitation du gisement d'Imouraren, au nord-ouest, les élections présidentielles pourraient changer la donne. Elles se tiendront d'ici 7 à 8 mois et selon la Constitution, le président actuel, Mamadou Tandja ne pourra pas s'y représenter. L'uranium, nécessaire à l'activité des centrales nucléaires peu émettrices de CO2, doit être exploité durablement, non pas aux dépens de l'homme et de son environnement. 

    Source: le JDD.fr

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