• « Le MNJ dépose les armes » : fausse manip ou vraie intox ?

    « Le MNJ dépose les armes » : fausse manip ou vraie intox ?
    Le lundi 18 Août 2008, Télé Sahel a livré à ses spectateurs un spectacle peu ordinaire. Un reportage grandeur nature sur la rencontre d'Ubari. Sans vouloir jeter l'anathème ni s'adonner à une quelconque agitation de symbole, il importe de décortiquer objectivement ce qu'il convient aujourd'hui d'appeler, un coup d'épée dans l'eau.
     

    De l'élément présenté par Télé sahel.

    Les Nigériens sont tombés de haut en suivant sur leur petit écran une foule excitée, acclamant Aghali Alambo s'adressant au guide de la révolution libyenne. C'est d'autant plus surprenant que les deux personnages étaient jusque là considérés comme les pires ennemis de la nation et du peuple. Encore plus déboussolant, lorsqu'on se rend compte que le speech ne concernait nullement le cas spécifique du conflit nigérien. Au-delà de ce cérémonial offert en guise de cadeau de Noël aux téléspectateurs nigériens, le clou du JT aura été la brillante intervention en direct du Ministre de la communication, porte-parole du gouvernement. Avec un enthousiasme à peine dissimulé, le MC a trouvé les mots justes pour annoncer à la nation toute entière ce qu'il qualifie d'événement majeur, « la fin du conflit dans notre pays ».

    De l'intervention du Guide de la révolution libyenne.

    Dans son intervention, le Guide a tenu à donner son point de vue en quatre axes essentiels sur la situation qui prévaut au Niger et au Mali. Il convient de souligner que l'analyse n'est nullement nouvelle.
     

    L'utilisation de la lutte armée comme moyen pour rétablir les inégalités n'est plus dans l'air du temps.
    Encore faut-il rappeler que la déclaration universelle de droit de l'homme stipule dans son préambule : « Considérant qu'il est essentiel que les droits de l'homme soient protégés par un régime de droit pour que l'homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l'oppression. »

    A ce sujet, si le déclenchement des hostilités est imputable au MNJ, le gouvernement nigérien est quant à lui responsable d'en avoir créé les conditions, mais aussi et surtout coupable de la gestion qu'il en a faite par la suite, en particulier la barbarie et de la désolation qu'il fait subir aux populations civiles de la région d'Agadez depuis ces vingt derniers mois.
     

    Il n'est point envisageable de revendiquer un quelconque territoire.
    Ceci n'a jamais été d'actualité au MNJ, même si ses détracteurs ont toujours souhaité qu'il en soit ainsi.

    Le souhait des jeunes de rompre avec la guerre.
    C'est là une réalité mainte fois réaffirmée par le mouvement. Ceci n'est malheureusement pas du souhait du Niger qui a su adroitement entretenir l'état de guerre.
     

    Le guide a réaffirmé également son désir de voir s'instaurer la quiétude et la sérénité dans ce Sahara en proie aux trafics de tout genre.
    Le MNJ a toujours attiré l'attention des dirigeants nigériens et de la communauté internationale sur ce fait.

    De l'intervention d'Aghali Alambo

    Dans son intervention, Aghali a certes décliné son identité en tant que président du MNJ mais s‘est gardé d'évoquer le conflit qui oppose son mouvement à l'Etat du Niger.

    Nulle part dans ses propos il n'a été question d'un quelconque cessez le feu encore moins d'un avènement de la paix qu'il faille saluer solennellement.

    Invité à la rencontre d'Ubari, Alambo en a profité pour transmettre un message d'Ibrahim Ag Bahanga adressé au guide la révolution libyenne. Pourquoi le Niger fait il un tapage médiatique autour de cet événement si ce n'est pour tromper l'opinion nationale et internationale. Faire croire qu'il désire la paix tout en œuvrant pour la continuité du conflit.

    De l'intervention du Ministre Ben Omar

    Dans son intervention le Ministre a fait l'apologie de la paix et de l'unité nationale.

    Il a fait entendre aux Nigériens la satisfaction du gouvernement en voyant enfin le terme du conflit. « Nous découvrons à l'occasion que le gouvernement est conscient de la désolation et des souffrances de tout une partie de la population... » Souffrance qu'il accentue par son état de mise en garde qui dure depuis bientôt un an. Souffrance qu'il fait subir à des centaines de citoyens innocents qui croupissent dans les prisons de haute sécurité. Les exactions et les exécutions sommaires sont présentées par le porte parole du gouvernement en véritable prouesse digne de remonter le moral du peuple Nigérien.

    Chassez le naturel, il revient au galop. Le ministre précise quelques heures plus tard aux medias internationaux qu'aucune négociation n'est envisageable avec le MNJ.
     

    Que faut-il retenir ?

    Nous ne sommes pas dans le secret de nos chefs d'Etat. Nul ne peut savoir concrètement les engagements qui ont pu être pris entre les colonels Kadafi et Tandja.

    En revanche, nous pouvons affirmer sans craindre de nous tromper que la paix ne fait pas l'affaire du gouvernement nigérien. Du moins à ce jour. Il est très facile de manipuler l'opinion lorsque qu'on devient maître absolu du bateau.

    Nous sommes dans le feu de l'action mais les Nigériens découvriront un jour, qui est le vrai responsable de ce conflit et à qui il profite.

    En attendant, Tandja et son équipe ont un rôle confortable et leur argumentaire est imparable devant n'importe quelle opinion qui ne soit pas au fait de nos réalités.

    « Ce sont eux qui ont pris les armes ! Ils n'ont qu'à les déposer et rentrer au pays ! Nous sommes victimes et espérons que nos frères se rendront un jour compte de leur erreur et rentreront aux bercails » L'esprit simple dira qu'après tout c'est logique et il a tout à fait raison.

    Sauf qu'au fond notre équipe dirigeante connait parfaitement toutes les ficèles qui permettent de pérenniser le conflit. Arrestations arbitraires, déportations, tortures, exactions et assassinats, distribution à tour de bras des concessions minières englobant l'intégralité du territoire d'occupation des populations nomades du nord. Toutes choses qui tranchent avec une politique soucieuse de l'avenir à moyen et long terme des populations, un monde civilisée et une société moderne et démocratique et qui permettent de multiplier les révoltés.


    Aujourd'hui nous pouvons dire que Tandja a bien réussi son coup. Le conflit est une réalité tangible. Les méchants qui terrorisent le peuple doivent rentrer sans condition. Tandja étant conscient que ça ne peut pas se passer ainsi, son conflit continuera indéfiniment, ou du moins tant qu'il en aura besoin pour ses calculs politiques.

    Il se donne bonne conscience en affirmant qu'il souhaite la paix et la stabilité tout en œuvrant pour la haine et la désolation. Il peut se permettre de dilapider les moyen de l'Etat car après tout l'effort de guerre est justifié par un souci de sauvegarde de l'intégrité nationale. L'ambition de la partition du pays collée au MNJ justifie cette démarche. Et pourtant tout le monde sait que cette idée a été inventée par le gouvernement nigérien pour s'allier l'opinion nationale. L'opposition politique, sensée avoir un regard critique sur ces aberrations a démissionné depuis un an, en échange d'on ne sait quoi.

    Par conséquent, il ne faut pas se leurrer, Tandja et son équipe soufflent le chaud et le froid. Ils ont réussi, en manipulant l'information un coup de maître. Nous ne savons pas encore tous les usages qu'ils veulent faire de ce conflit, au-delà d'avoir réussi à régner en maître absolu sur le pays. Nourrit il l'ambition de provoquer le déplacement massif des populations pour laisser la place aux sociétés extractives ou se limite-t il à un calcul plus égoïste, celui de faire perdurer son régime grâce à un climat d'insécurité savamment entretenu ?


    Un jour, les Nigériens découvriront qu'ils ont été menés en bateau et diront « Alla Ya Issa ». Ceux qui vivent le conflit le disent déjà.

    En attendant, prions tous pour qu'un jour nos personnalités prennent de la hauteur et cessent de jouer aux griots politiques. C'est proprement humiliant pour les citoyens que nous sommes.


    Issouf MAHA

    Maire Tchiro.

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