• Issouf Ag Maha : Prendre de la hauteur

    Issouf Ag Maha : Prendre de la hauteur
    Faut-il se lasser de le rappeler ? Faut-il se taire par crainte de s'attirer les foudres des radicaux et autres extrémistes, les opportunistes et autres va-t-en guerre ? Assurément non.

    Seize mois après le déclenchement des hostilités au Nord Niger, les conditions sociales et économiques des citoyens ne font que se dégrader à tel point qu'on est tenté de se demander par quel miracle les populations civiles déplacées et isolées, désœuvrés et sans revenus arrivent encore à subvenir à leurs besoins vitaux.

    Pendant que les pro et les anti MNJ, les opposants et les partisans du régime en place à Niamey se focalisent sur le « pourquoi » ou la pertinence du conflit, la position de force de l'une et de l'autre parties en présence, la véracité ou non des bilans donnés par les uns ou les autres, il me semble plus que jamais urgent que les responsables de notre pays se soucient des réalités dramatiques que vivent les populations confrontées quotidiennement au spectre de la guerre.

    L'heure n'est plus aux recherches du diagnostic et autres failles ayant guidé à la situation actuelle, encore moins aux calculs politiques quant au positionnement social qu'on en tirerait, mais plutôt au sursaut patriotique, sursaut qui aurait sans nul doute épargné les vies des dizaines, voire des centaines de nos compatriotes.

    Le fait est là et ne peut relever d'un débat philosophique ou politique. Pendant que les conséquences du conflit deviennent de plus en plus insupportables pour nos populations, les belligérants se glorifient à travers une guerre de communiqués de leurs prouesses et leurs performances. Ces victoires annoncées avec grand éclat se mesurent hélas en nombre de Nigériens abattus et en atrocités dans la méthode utilisée pour tuer et massacrer, pour réduire au néant, pour détruire les moyens matériels et autres cheptels.

    En spectateur impuissant, le peuple nigérien est pris en otage et n'a nullement le droit à la parole au risque de se voir rangé dans l'un ou l'autre camp. Ceux qui sont contre la haine et la violence ruminent dans le chagrin une déception mêlée de crainte.

    Tétanisés par la hantise de se voir indexés d'opposants à la logique de guerre et donc ennemi de la nation et passible de la peine capitales, ils se terrent dans un anonymat désolant et frustrant, attendant patiemment l'hypothétique sursaut national.

    Au demeurant, au-delà de ce tableau on ne peut plus sombre et déroutant, une situation d'enlisement évident, frisant la paralysie voir l'autodestruction national, il importe de reconnaître l'existence de quelques atouts permettant d'entrevoir une once d'espoir quant au retour de la paix et le sérénité dans notre pays.

    1/ De l'Etat du Niger :

    Même si le régime actuel a progressivement renoué avec les méthodes de la ténébreuse époque d'exception, époque durant laquelle le président Tandja a joué le rôle peu flatteur de membre influant du CMS (Conseil Militaire suprême), le fait est qu'il a été deux fois de suite investi de la confiance du peuple nigérien. A ce titre, il détient sans ambiguïté la légitimité requise pour engager le Niger dans un processus de paix et de réconciliation nationale. C'est là une logique importante qui garantirait la pérennité d'un accord éventuel entre fils du pays.

    2/ Du MNJ

    Le MNJ est devenu au fil du temps une véritable machine de guerre équipée et déterminée à tenir tête à l'armée nigérienne. En quelques mois d'activités le mouvement contrôle la quasi-totalité de l'Aïr sachant que la rébellion des années 90 est parvenue à la bordure de l'Aïr notamment à Tezirzet après quatre années d'insurrection. Ce sont des milliers des combattants qui maîtrisent parfaitement le terrain et capables de tenir plusieurs années dans ces conditions. Leur chef de guerre, Aghali Alambo a su faire l'anonymat autour de lui et imposer une ligne de conduite qui tranche avec les anciennes méthodes. Les combattants, avant d'accéder aux bases, ont tous prêté serment en jurant sur la Coran qu'ils ne toucheront jamais aux civiles et à leurs biens, à l'unité nationale et à l'intégrité territoriale du Niger. Ceci a permis d'éviter les dérapages sur les civiles et les pillages des paisibles citoyens. Ce mécanisme a joué un rôle déterminant dans la gestion des hommes lors du massacre des civiles à Tadak, massacre présenté par notre Etat comme une véritable victoire de guerre et qui fait espérer les plus naïfs à un ratissage de l'armée sur les bases rebelles et donc un règlement militaire du conflit. En effet, plusieurs combattants ont caressé après cette expérience l'idée de vengeance sur les civils, ce qui fatalement, aurait donné lieu à un embrasement général.

    3/ Du peuple nigérien

    L'échec manifeste des va-t-en guerre et autres agités dans leur campagne d'incitation à la haine ethnique est révélateur de l'état d'esprit d'un peuple aux liens séculaires et qui a toujours refusé la confrontation. L'esprit de tolérance et de réconciliation reste également très encré dans la culture et les traditions Nigériennes.

    En tout état de cause, l'équilibre socio politique ô combien fragile de la zone saharienne et ses implications multiples donne une bien maigre marge de manœuvre et l'on se trouve plus que jamais aujourd'hui devant le risque d'une « Far-westisation » de cet espace géographique. La communauté international, consciente et inquiète de cette situation n'a aucun moyen d'action par respect à la souveraineté du Niger et le principe de la non ingérence.

    C'est pourquoi, nous lançons encore une fois un appel à tous les fils du pays, afin de mettre à profit ces quelques atouts en notre possession pour le retour rapide de la paix, Le bannissement définitif de la guerre et l'arrêt immédiat de la violence.

    Il est grand temps aujourd'hui de rompre avec l'attitude schizophrénique qui consiste à déplorer sans cesse l'état d'insécurité et ses conséquences économiques et sociales sur le pays, tout en favorisant l'enlisement voire le pourrissement de la situation. En attendant, oserons nous espérer que la mission onusienne qui se rendra au Niger dans les prochains jours, mission suffisamment étoffée et bien avertie quant à la gravité de la situation pourra faire prendre conscience au gouvernement Nigérien du danger réel qui plane sur la nation et sur la sous région toute entière.

    Issouf Ag MAHA Maire Tchirozerine

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