• Exploitation de l’uranium au Niger : Une méga pollution en perspective

    L’inauguration, le 4 mai dernier, dans la région d’Agadez, du complexe minier d’Imouraren, le plus grand chantier jamais lancé en Afrique, ouvre un immense espoir pour le Niger, en terme de retombées économiques. Mais l’énorme espoir suscité par le 2èmeplus grand chantier d’extraction d’uranium au monde risque d’être un véritable cauchemar pour les populations locales. En effet, selon les mesures de la Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la radioactivité (CRIIRAD) de 2004 et 2005, les eaux distribuées dans la ville minière d’Arlit où opère Areva « ne sont pas aux normes de potabilité, avec un taux de contamination dépassant de 7 à 110 fois les recommandations de l’OMS. »

    Aussi, la surconsommation d’eau nécessaire aux mines contribue à l’épuisement accéléré des ressources fossiles dans une région qui en manque cruellement. La région d’Agadez est durement frappée par le phénomène de la désertification. Il pleut rarement et le relief est fait de dunes de sable avec de très fortes températures.

    Par ailleurs, note le CRIIRAD, « d’énormes masses de déchets radioactifs, dits improprement « stériles », et des boues radioactives générant des poussières et des gaz comme le radon sont laissées à l’air libre. Un « stérile » a même été identifié à l’entrée de l’hôpital d’Arlit ! Pire, des ferrailles contaminées sont utilisées par la population, l’exposant ainsi directement à la radioactivité. »

    Les organisations de la société civile nigérienne dont l’association Aghir In Man et ROTAB, ont alerté Areva et les responsables politiques nigériens sur les dangers de l’ouverture d’un tel chantier. Rien n’a été fait pour amoindrir les risques auxquels les populations sont exposées. Il est fort à craindre qu’Areva s’apprête à reproduire les même conditions d’exploitation à « Imouraren, une mine à ciel ouvert beaucoup plus étendue, située à proximité de zones habitées et de zones de pâturages primordiales pour les populations locales. »

    Avec seulement les simples explorations précédant la future extraction, le site de la mine a, d’ores et déjà, un taux de radioactivité particulièrement élevé. Et pour couronner le tout, une parfaite opacité entoure l’exploitation de cette mine. Les résultats de l’étude d’impact réalisée par Areva sont quasi confidentiels. Aucune contre-expertise scientifique indépendante pouvant garantir la fiabilité des données n’existe. C’est pourtant l’exigence de la société civile et même des responsables locaux. Les enjeux liés à l’eau, à l’accès à la terre et aux conséquences sociales ne semblent pas être non plus une préoccupation des deux parties. Ainsi, « l’exploitation de l’uranium au Niger se trouve dans une double opacité. » De même, les conditions de mise en œuvre de ce projet, au niveau écologique, économique et du respect des populations ont été élaborées dans l’opacité la plus absolue. Personne ne connaît les clauses ni les contours. Récemment, l’Assemblée nationale (avant sa dissolution) a tenté de mettre en place une commission d’enquête parlementaire pour voir les conditions dans lesquelles les permis sont délivrés.

    Mais la proposition a été rejetée aux calendes grecques par une majorité de députés. Et la parenthèse a été vite refermée pour laisser place à l’opacité. La société Areva, dont l’ancêtre est la Cogema, exploite l’uranium au Niger depuis 1968. Cette exploitation ne contribue ni au développement du pays ni à l’amélioration du niveau de vie des populations. Mais, ces deux dernières années, des ristournes sont consenties au profit des populations de la région d’Agadez. Cette exploitation comporte des conséquences sanitaires et sociales désastreuses pour la population locale et l’environnement.

    La relation bien particulière de la France avec le Niger avait permis par le passé un accès exclusif à l’uranium à un prix ridicule, grâce à un accord signé en 1961, rappelle t-on. Le contrat d’Imouraren reste dans la même lignée : l’Etat du Niger n’a que 33 % des parts de la société d’exploitation. Tandis que le prix d’achat de l’uranium reste bien en deçà des cours du marché international. On se rappelle que les négociations ayant abouti à la cession du permis d’Imouraren avaient jeté un froid dans les relations entre Paris et Niamey. Serait-ce là que s’est noué un deal ?

    Pour l’heure, la France évite d’évoquer les questions qui fâchent relatives au bilan humain lors du conflit dans le Nord Niger évoqué lors de la 11èmesession du conseil des droits de l’Homme de l’ONU qui se tient du 2 au 18 juin 2009 à Genève (Suisse). Elle a aussi fait l’impasse sur le projet de prolongation du mandat du président Tandja, qui cristallise actuellement toutes les attentions. La garantie des intérêts prime manifestement sur toute autre question. Le vent peut continuer à souffler même du haut en bas.

    H. Adamou
    le Republicain 

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