• Ainsi donc Tandja craint la honte !

    Selon RFI, l’ancien président du Niger, Mamadou Tandja, a adressé une lettre de demande de clémence à la junte qui a mis fin à son pouvoir le 18 février 2010. En plus de cette lettre à la junte, le locataire de la Villa verte à Niamey, a signé une autre missive, cette fois à adressée au président de la Cour de Justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Dans cette dernière, il prie la juridiction communautaire de ne tenir compte d’aucune plainte déposée en son nom, indiquant qu’il n’a "mandaté personne et en aucune manière" à ce sujet. Il avoue avoir agi sans aucune contrainte de quelque nature que ce soit et "en âme et conscience".

    Mais l’on est en droit de se demander s’il a vraiment adressé cette dernière correspondance sans contrainte. Cette question vaut son pesant d’or en ce sens que dans le courrier remis à la junte, il écrit ceci : "J’ai l’honneur de vous adresser cette requête pour vous demander votre clémence et votre indulgence par rapport au dossier de plainte déposé en mon nom auprès de la CEDEAO". C’est à croire, à la lecture croisée de ces deux documents, que si l’ex-homme fort de Niamey n’a pas été contraint de façon directe à écrire à la Cour de Justice communautaire, il a, au moins, compris que la voie judiciaire empruntée par ses proches pourrait radicaliser les nouveaux maîtres de Niamey, ce qui l’a décidé à négocier leur pardon. Ce faisant, Tandja pose un acte d’humilité. C’est peu de dire qu’en l’espace de quelques mois, de sa brusque descente du paradis aux enfers - de la gloire à la déchéance -, il est passé par toutes les émotions. Comme quoi, du Capitole à la Roche tarpéine, il n’y a vraiment qu’un pas.

    Par ailleurs, le président déchu demande que la junte ne le livre pas à la justice de son pays et qu’elle le maintienne dans sa prison dorée au regard de son "état de santé qui nécessite un suivi régulier". Dans la peur d’être traîné à la barre, Mamadou Tandja veut s’éviter un procès. Ainsi donc il craint la honte ! Comme le dit un dicton de chez nous, "le tueur a peur du gourdin". On a, en effet, en mémoire ce que ce chef d’Etat a fait vivre comme vexations, humiliations et embastillements à la volée, à tous ceux qui, à l’intérieur des frontières de son "royaume", avaient osé commettre un quelconque crime de lèse-majesté en critiquant d’une façon ou d’une autre son coup de force constitutionnel. Aujourd’hui, de "l’autre côté du pouvoir", il craint les effets possibles de la décision de la junte de le mettre à la disposition de la Justice.

    Reste à savoir si le profil bas adopté par le président déchu lui permettra d’atteindre son objectif ou si la junte fera prévaloir le droit tant il est vrai que la gestion du régime de l’ancien président, notamment vers la dernière phase de son mandat légal, a fait d’énormes dégâts (troubles politiques, famine, etc.) qui nécessitent que leurs conséquences soient tirées. En la matière, la méthode la plus idoine est le recours à une procédure judiciaire indépendante qui dira le droit et rien que le droit ; quitte à ce que le peuple nigérien décide, souverainement, de pardonner. Un procès de Tandja et de son régime pourrait, au-delà des seules frontières du Niger, faire réfléchir un tant soit peu, tous ceux qui ne raisonnent que sur la base de leurs seuls intérêts.

    Ainsi que les partisans de tout acabit des pouvoirs à vie par tous les moyens et quel que soit ce que cela coûte aux populations et à leur pays. Même s’il est vrai que cette situation peut ne pas servir de leçon à certains dirigeants africains pas si différents de Tandja, qui, pensant que ça n’arrive qu’aux autres, foncent tête baissée jusqu’à ce que l’irréparable se produise. Pour revenir au Niger, un tel procès pourrait servir de catharsis, après les turpitudes de Tandja et servirait, à l’exemple du Mali qui a jugé son ex-président Moussa Traoré et est reparti sur de nouvelles bases, à l’émergence d’une nouvelle citoyenneté politique moulée dans un patriotisme sincère et empreint des vraies valeurs démocratiques.

    "Le Pays"

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