• Ainsi donc, les greniers de Tandja étaient vides !

    Le jeudi 18 février 2010, Mamadou Tandja, auparavant seul colonel à la tête de la caravane dans le désert du Niger, voyait un groupe de militaires mutins mettre fin à ses pouvoirs autocratiques à Niamey, la capitale. Le Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD), depuis cette date, inoubliable pour les Nigériens épris de liberté, a entrepris de balayer la maison.

    On découvre alors que l’ex-président avait souvent caché certaines vérités à ses compatriotes et à la Communauté internationale dans bien de domaines relatifs à la situation sociopolitique de son pays. La question de la famine, dont il avait, pour préserver son trône, peint un tableau plutôt mirobolant, allant même jusqu’à chasser de son territoire des organisations non gouvernementales qui avaient osé poser le problème, a longtemps été un sujet de débat.

    En 2005, lors de la grande crise alimentaire, pour parler comme les dignitaires nigériens d’alors, les autorités avaient toujours tenté de convaincre l’opinion que la menace de famine était une simple rumeur malveillante, déshonorante. Point de péril donc en la demeure, criait-on à tue-tête. Le Président Tandja, en toute solennité, ne s’était pas gêné de déclarer qu’il n’y avait point de famine au Niger.

    Pour le maître de Niamey, il s’agissait plutôt d’un simple déficit alimentaire dans… certaines régions du pays, qui a, du reste, enregistré un surplus céréalier de 80 000 tonnes. Quelques jours après, son Premier ministre (PM), dans des propos non moins fallacieux, appelait pourtant à l’aide, sur Radio France International, la Communauté mondiale, pour cause de …famine. En son temps, la plupart des Nigériens qui n’étaient pas sur la même longueur d’ondes que leur président quant à la question de la pénurie, le trouvaient en déphasage avec leur quotidien dramatique.

    Aujourd’hui, la vérité est toute nue : dix jours seulement après le changement de régime au Niger, on apprend, dans une déclaration télévisée du chef de la junte au pouvoir, que la famine “menace l’existence de millions de Nigériens dans quasiment toutes les régions”. Le déficit en vivres est alors estimé à 400 000 tonnes. Tout le contraire donc des péroraisons de Mamadou Tandja, qui était allergique à l’idée de risques de pénurie alimentaire.

    A la suite du chef d’escadron Salou Djibo, président du CSRD, son PM, Mahamadou Danda, reconnaissant l’urgence de la situation, a lancé, le mercredi 10 mars dernier, devant les partenaires étrangers du Niger, « un appel pressant » à un « soutien massif » de la Communauté internationale face à la crise alimentaire, qui menace de plus en plus, plus de la moitié de la population, 58%, soient 7,8 des 15 millions d’habitants. Le Niger, selon Mahamadou Danda, a besoin de 123 millions de dollars d’aide internationale pour combattre la famine cette année.

    En attendant cette éventuelle aide, le PM entend, en collaboration avec le gouvernement, concentrer les actions urgentes dans les zones vulnérables ; organiser des ventes promotionnelles de vivres au plus éprouvés ; faire des distributions gratuites aux indigents ; créer des banques de céréales… Contrairement à Tandja, qui avait visiblement choisi d’affamer son peuple pour sauver son fauteuil bien que ses greniers étaient désespérément vides, la junte, elle, a opté pour une position de sagesse.

    Les partenaires au développement, conscients que la famine au Niger peut conduire à de nouveaux problèmes de stabilité, ont donc accepté de l’aider, avec le secret espoir de contribuer à l’instauration, au pays d’Hamani Diori, d’une démocratie véritable, sans laquelle tout effort de promotion socioéconomique est voué à l’échec. Ils ont dès lors annoncé la couleur par des promesses fermes : l’ONU, à travers sa représentante à Niamey, envisage une « contribution financière et un appui-conseil » au Niger ; L’Union européenne (UE), pour sa part, assure de la disponibilité des donateurs à accompagner les autorités nigériennes dans la recherche de solutions à la menace.

    Les travailleurs humanitaires, qui reconnaissent qu’il était difficile d’évoquer ouvertement les risques de pénurie alimentaire sous Tandja, sont aujourd’hui très nombreux à espérer, les Nigériens avec eux, que les choses évolueront désormais favorablement. C’est en tout cas le souhait de tout un peuple, auquel on a toujours raconté des sornettes, préférant sacrifier, toute honte bue, son bonheur sur l’autel de l’égoïsme, de la volonté permanente et maladive de domination.

    D. Evariste Ouédraogo

    L’Observateur paalga

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